[Tweede jaargang]
Eerste voorstelling
Programma
1. | GERMAINE DULAC: CONFÉRENCE ET CHOIX DE SON OEUVRE |
2. | GERMAINE DULAC: LA COQUILLE ET LE CLERGYMAN |
Van Germaine Dulac, de Parijsche cinéaste, gaf de Liga het vorig jaar een film ‘Invitation au Voyage’, die in het algemeen met sympathie werd begroet. Dit gaf het Bestuur aanleiding, de energieke voorvechtster der nieuwe kunst uit te noodigen, persoonlijk in ons land eenig ander werk van haar hand te komen toelichten. Terwijl wij deze taak dus aan Mme Dulac zelf kunnen overlaten, bepalen wij ons hier ter plaatse tot het aanhalen van een enkele opmerkelijke uiting van en over de cineaste. De journaliste Marguérite Ravel schreef over haar in ‘L'Avenir de la Meuse’ o.a.:
Madame Germaine Dulac est la première femme en France qui ait osé aborder la tâche ardue et si ingrate de metteur en scène, et qui, avec un courage et une confiance en soi qui n'abdiquent jamais, soit arrivée à de si beaux résultats. C'est que Germaine Dulac est une travailleuse, c'est qu'elle est animée d'un esprit artistique remarquable, c'est qu'elle est non seulement une animatrice sensible, mais encore une créatrice dans l'art des images animées et dans la photographie, et qu'elle appartient avec Léon Poirier, Jacques Feyder, L'Herbier, Abel Gance, de Baroncelli et quelques autres, à l'élite cinématographique qui espère orienter le cinéma français vers des voies nouvelles...
Chaque nouveau film de Germaine Dulac est un évènement, car chaque fois s'y révèle sa puissance remarquable d'innovation artistique; chaque fois s'y constate sa grande ambition de voir le cinéma monter, monter toujours vers un idéal de juste appréciation...
Le cinéma n'est pas un art pour exprimer des actes purement extérieurs, mais pour visualiser les moindres nuances de l'âme, dans sa vie intérieure.
Germaine Dulac parle ainsi. Elle ne se contente donc pas de placer des décors, de régler les lumières, de créer une ambiance concordant à l'action de son film, elle veut qui s'y révèle avec un souci du détail, les états d'âme de ceux qu'elle fait vivre. Elle est donc une grande amoureuse de l'art qu'elle sert, car elle le sert avec son âme, et veut que tout, autour d'elle et par elle, ait une âme...
Germaine Dulac a mis au monde bien des enfants: Les Soeurs ennemies, avec Suzanne Desprès; Ames de fous, avec Eve Francis; Malencontre, avec Jeanne Brindeau; La Cigarette; La Mort du Soleil et La Belle sans merci où l'on peut, mieux que dans les précédentes productions, étudier ses tendances artistiques. Puis La Fête espagnole, du regretté Louis Delluc, et La souriante Madame Beudet, où elle est parvenue à analyser très finement la vie intérieure de ses personnages, pour le plus grand intérêt du spectateur, qui suit et adopte son idée. Peut-on oublier aussi La Folie des Vaillants, peut-on oublier l'imposante reconstruction du moyen âge que Germaine Dulac nous a donné avec Le Diable dans la Ville, film interprêté par Léon Mathot et Jacqueline Blanc? Peut-on oublier Gossette, avec Monique Chrysés et Georges Charlia?
J'ai vu Ame d'Artiste, avec Yvette Andreyor, Koline, Bérangère et Miss Pulton. Avec quel souci du détail fut réalisé ce film! Quelle maîtrise puissante y est révélée, quelle sûreté dans le choix des interprêtes et sous quelle merveilleuse influence on sent qu'ils évoluent!
Germaine Dulac zelf uit zich in het pas verschenen ‘Le Rouge et le Noir’ onder het hoofd ‘Films visuels et anti-visuels’:
Dans l'état actuel de la Cinématographie mondiale, les critiques, les études, les polémiques ont autant de valeur agissante que les réalisations. Je dirai même qu-elles en ont plus. Jetant un rayon lumineux sur l'avenir obscur, elles aiguillent avec altruisme le cinéma vers un but précis, lui révélant sa force idéale, son image parfaite alors qu'il ne peut les contempler actuellement que déformées.
Le réalisateur, lui, ne possède que de piètres instruments de lutte. Sa volonté d'artiste est constamment brimée. II est esclave. Et j'ajouterai même cette vérité cruelle, qu'il est esclave et presque heureux de l'être. Quand il ne l'est pas c'est qu'il ne travaille pas, qu'il ne peut manier les expressions et la lumière, sonder les mystères de l'objectif et des prismes, posséder matériellement l'image.
Qui d'entre nous, réalisateurs au pur idéal, ne donnerait un peu de cet idéal même pour mieux s'appropier la connaissance du cinéma et saisir dans sa technique la vérité de son esprit. Esclave, le réalisateur cinégraphique l'est. On ne lui donne l'argent nécessaire à l'élaboration de son travail que contre une profession de foi de dépendance au goût du public, et pour mieux servir son dieu, pour en connaitre la volonté, il préfère abjurer. Ces dernières années j'ai eu bien souvent cet exemple tragique, de jeunes venant à moi pleins d'ardeur, d'espoirs, d'idées originales, d' activité novatrice, sombrant comme nous tous dans la production courante.
Le secret de cet esclavage: l'étau économique. Un musicien écrit une symphonie ou une oeuvre lyrique. Un écrivain compose un poème, un roman ou une pièce de théâtre. Un peintre est touché par une couleur, par un jeu de lumière. Que faut-il à ces artistes pour réaliser l'oeuvre qu'ils ont conçue: du papier, de l'encre, une toilet des couleurs.
Pour créer ces images, il faut un arsenal d'instruments coûteux. Combien peu de mécènes ont dit aux artistes: réalisez votre inspiration en dehors de tout souci. Et les cinéastes restent sous le joug, impuissants, escomptant l'évolution apportée par les années qui passent pour atteindre la terre promise de leurs rêves, la terre promise où les verbes penser, sentir, équivaudront, pour celui qui en aura le don, au verbe créer.
Un art ne grandit pourtant qu'en proportion du cerveau et des tendances des artistes qui cherchent à s'exprimer librement en lui. Or, jusqu'à présent les réalisateurs de films ont dû s'exprimer sur commande et non s'exprimer tout simplement. Lasupériorité des études altruistes sur les réalisations matérielles est donc incontestable.
Je répète à tout instant ces mots ‘visuel, visuellement, vue, oeil’. Or, il existe un fait contradictoire. Si de par sa technique le cinéma est uniquement visuel, il se trouve que de par son esthétique morale, il dêdaigne ce qui est purement visuel: l'image, pour ne s'attacher qu'à reproduire des expressions où l'image tient peut-être une place, mais non la plus importante.
Par exemple le cinéma enregistre des clichés photographiques, non pour émouvoir ‘visuellement’ mais pour raconter ou embellir des anecdotes qui n ont pas été essentiellement créées pour être vues, mais pour être lues ou entendues. Au lieu de s'attacher à la valeur de l'image et à ses rythmes, les oeuvres actuelles s'attachent à l'action dramatique. Entre dialogue muet ou musique de silence il y a un monde.
Un vrai film ne doit pas pouvoir se raconter puisqu'il doit puiser son principe actif et émotif dans des images faites d'uniques vibrations visuelles. Raconte-t-on un tableau? Raconte-t-on une sculpture? Certes pas. On ne peut évoquer que l'impression et l'émotion qu'elles dégagent.
Les oeuvres de l'écran, pour être dignes du sens profond du cinéma, ne devraient pas non plus tenir dans un récit, la puissance de l'image devant seule agir et primer toute autre qualité. Dans l'élaboration d'un film, on prône d'abord l'histoire et l'on place en second plan l'image, c'est-à-dire que l'on préfère le théâtre au cinéma. Quand le rapport sera renversé, le cinéma commencera dès lors à vivre selon sa propre signification. Lutte de l'image prise au sens profond de son orchestration, contre la littérature.
Tout le problème du cinéma est dans ce mot ‘visualisation’.
Je ne vous paraîtrai donc pas paradoxale en vous disant:
L'avenir est au film qui ne pourra se raconter, et je m'explique.
Le choc visuel est éphémère, c'est une imprespression que l'on reçoit et qui suggère mille pensèes. Choc analogue à celui que provoque une harmonie musicale.
Le cinéma peut certes raconter une histoire, mais il ne faut pas oublier que l'histoire n'est rien. L'histoire c'est une surface.
Le septième art, celui de l'écran, c'est la profondeur rendue sensible, qui s'étend au-dessous de cette surface, c'est l'insaisissable musical.
Film anecdotique ou film abstrait, le problème est le même. Toucher la sensibilité par la vue et donner, comme je l'ai déjà dit, la prédominance à l'image en écartant ce qui ne peut être exprimé par elle seule. Or, l'image peut être aussi complexe qu'une orchestration puisqu'elle peut se composer de mouvements combinés d'expression et de lumière.
Cinéma visuel, ces deux mots accouplés semblent un pléonasme. Plus tard peut-être, maintenant non...Le cinéma à l'heure actuelle est anti-visuel. Rendons-le visuel et sincère. C'est toute la première grande réforme à tenter.
DE FOTOGRAFIE VAN GERMAINE DULAC OP DEN OMSLAG IS VAN F. LOWY, PARIS